Dégustation de chocolats, le cacao péruvien

Dégustation de chocolats, le cacao péruvien

On s’entend que manger une Kit-Kat (miam) c’est pas la même chose que de déguster un chocolat noir de qualité. Mais si t’es comme moi, t’as probablement jamais entraîné tes papilles à reconnaître les arômes qui définissent les différents types de cacao. Je ne connaissais absolument RIEN au chocolat, jusqu’à ce que je rencontre deux amis, David et Rover, qui travaillent dans le domaine et qui ont pris le temps de nous enseigner. Merci beaucoup!

Avant de commencer, un peu de contexte… Quand j’ai fait mon stage au Pérou, je suis devenue amie avec deux personnes très spéciales au Café Aicasa à Quillabamba (aussi connue comme la ville de l’été éternel). David, qui travaille à la chocolaterie La Ibérica et a étudié en chimie alimentaire, et Rover, qui travaille pour la Rainforest Alliance et a étudié en agronomie en France. Les deux forment des producteurs de café et de cacao dans le Bajo Urubamba et encouragent des méthodes de culture et de commercialisation durables.

Même si la crise du coronavirus a précipité mon retour à la maison, on a eu la chance de passer de bons moments ensembles en savourant des chocolats. Aujourd’hui, je te partage mon apprentissage avec eux à propos du cacao, une spécialité du Pérou.

La ville de Quillabamba (photo de mon amie Marie-Dominique Simard)


Le cacao: un ingrédient de base


Il existe de nombreuses variétés de cacao dans le monde et chacune d’elles donne un profil différent au chocolat. Par exemple, le meilleur cacao du Pérou s’appelle le «chuncho» et provient du département de Cusco. Le meilleur cacao du Venezuela s’appelle le «porcelana» et il est de Maracaibo.

Le cacao chuncho, par exemple, est divisé en plusieurs catégories appelées «écotypes«. Par exemple, le cacao chuncho «blanco» est un écotype. Le cacao chuncho «señorita» est un autre écotype. Il en existe environ 30 variétés! David nous a expliqué que la «señorita» s’appelle ainsi parce que sa cabosse est fragile, délicate et a des arômes fruités. La variété la plus rare du chuncho est le «blanco», car il y a très peu d’arbres qui produisent ces fruits. Turns out que les producteurs s’en sont longtemps débarrassés parce qu’ils pensaient que les fèves pâles étaient malades! Mais maintenant, c’est un écotype qui se revalorise car il a des arômes très recherchés. David nous a fait goûter des fèves de cacao blanc, tout qu’un privilège! La fève se suce et c’est délicieux, doux et onctueux!

Plus le cacao pousse en altitude, plus il captera les arômes, car la température est plus basse et la maturation est plus lente (bref, le fruit capte les arômes tout au long de sa maturation). La couleur des fèves de cacao change aussi d’une variété à l’autre: violet, blanc, brun… Étonnamment, le cacao a beaucoup de protéines!

J’ai demandé à David et Rover quel était un prix juste pour du cacao. Ils m’ont expliqué qu’en général, un prix équitable peut être calculé en ajoutant 100 soles (environ 39 $ CAD) au prix du marché par quintal (un quintal équivaut à 46 kg). Donc, si un quintal de cacao est vendu pour 300 soles (117 $ CAD), un prix juste serait d’au moins 400 soles (156 $ CAD). Ce prix couvrirait les coûts de production et donnerait aux producteurs un revenu raisonnable.

Ensuite, on a discuté des différentes catégories de cacao:

  1. Cacao «criollo» (du Venezuela jusqu’au Mexique)
  2. Cacao «forastero» (du Pérou, Brésil…)
  3. Cacao national (de l’Équateur)
  4. Cacao hybride (de Trinidad et Tobago)

Mais maintenant, de nouvelles études ont établi jusqu’à 10 catégories différentes! Le cacao étant originaire d’Amérique Latine, celui qui pousse en Afrique a donc été importé (surtout la variété «forastero»).

Finalement, au Pérou, le chocolat noir abonde vraiment (on parle de 65% et plus de cacao). J’aimais pas vraiment ça, mais je dois dire que j’ai appris à l’apprécier en vivant à Quillabamba. Comme quoi les goûts peuvent se développer!

Una cabosse de cacao poussant dans un arbre
Voici le cacao chuncho blanc! Une variété plus difficile à trouver. Les fèves se sucent et c’est très savoureux.


Comment se fabrique le chocolat?


Lorsque le fruit du cacao est récolté, il doit être transformé. Comme David travaille pour la chocolaterie La Ibérica, il nous a amenés à l’atelier de production pour une visite. C’était full intéressant!

Voici les quatre étapes de transformation du cacao:

  1. La fermentation (4 à 5 jours)
  2. Le séchage au soleil (5 à 7 jours)
  3. L’entreposage (10 jour à un mois)
  4. Le séchage final au soleil (2 heures)

Certaines entreprises vont faire un séchage final au soleil ou elles le feront de manière artificielle. Mais comme il y a beaucoup de soleil à Quillabamba, il faut en profiter!

À l’étape de la fermentation, la température augmente naturellement d’environ 25 ° C à plus de 45 ° C! Plus la fève fermente, plus elle développe de la saveur, mais plus elle perd d’antioxydants. Certaines entreprises nutraceutiques (un produit présenté comme une alternative pharmaceutique et qui présente des avantages physiologiques), par exemple, considèrent le cacao comme un super aliment pour ses propriétés antioxydantes. Mais pour garantir la présence d’antioxydants dans la fève, ils ne permettent pas une fermentation de plus de 40 ° C et ils préfèreront les fèves de cacao violettes. Pourquoi cette couleur spécifique? Parce qu’une fève hautement fermentée a tendance à brunir. Ainsi, un grain qui garde sa couleur violette a plus d’antioxydants.

Lorsque du chocolat de haute qualité est vendu, un profil du lot de fèves est effectué pour déterminer les arômes du cacao. Pour un lot d’environ une tonne, 300 grains doivent être ouverts et triés par couleur (chaque couleur est associée à un arôme spécifique: brun pour les tons chocolatés et violet pour les tons fleuris ou fruités).

Pour terminer la visite, on est allés à l’entrepôt et là David nous a expliqué que lorsqu’une fève de cacao a 7,5% d’humidité, elle peut être commercialisée. Quand le grain est bien sec, il peut être conservé un peu plus d’un an.

Une fois que le cacao a passé toutes ces étapes (ouf, c’est de la job!), vient ensuite le tour de la production finale du chocolat. Cette partie ne se fait pas à Quillabamba pour La Ibérica, mais David nous a quand même expliqué les étapes.

Les fèves de cacao sont d’abord torréfiées pour développer les composantes aromatiques. Ensuite, elles sont raffinées, étant moulues et pressées pour séparer le beurre de la masse de cacao. Puis vient le «conchado«, qui consiste à heurter les particules de cacao raffinées pour les limer, ce qui leur permettra d’être moins pâteuses à l’heure de la dégustation. Lorsque le conchado est fait, le sucre non raffiné est inclus. Pourquoi du sucre non raffiné? C’est pour que les particules entrent en collision et se liment entre elles: les ingrédients sont ainsi mieux incorporés et mélangés. Pour finir, les chocolats sont formés et enfin savourés. Prendre notre qu’un chocolat de haute qualité ne doit pas avoir d’eau!

Un jour, je te jure que je visiterai une chocolaterie (même si ce n’est pas celle de Willy Wonka, c’est mon grand rêve).

Les fèves de cacao sont fermentées dans ces caisses en bois
Lors de l’ouverture des fèves, tu peux clairement voir la couleur violette qui indique le début du processus de fermentation
Ici, les grains non fermentés sont comparés à ceux qui ont déjà fermenté!
Après la fermentation vient le séchage au soleil
Regarde comment les grains brunissent


Comment reconnaître un chocolat de qualité?


J’ai commencé mon expérience de dégustation avec des chocolats noirs aromatisés aux bleuets, à la mangue, à la noix de coco, aux cerises de terre (aguaymanto) et même à la coca! La première fois, c’était drôle, parce que j’en ai acheté plusieurs avec une amie (allô Marido!) et on s’est assises pour les déguster. On fermé les yeux pour essayer de deviner quelle saveur c’était et on a pas été capables, hahaha! Faut croire qu’il nous manquait de la pratique. Les yeux ouverts, j’ai enfin pu voir ceux que j’aimais le plus: bleuets et cerise de terre.

C’est plus tard dans le stage qu’on a eu l’occasion d’apprendre à «goûter» (essayer un aliment ou une boisson pour en examiner le goût ou la qualité). David et Rover ont eu la gentillesse de nous enseigner comment. On s’est donc donnés rendez-vous à la pizzeria Mamá Santusa, un endroit magnifique et délicieux au bord de la rivière Urubamba, et David a apporté sa collection de chocolats fins. Au fur et à mesure qu’on les dégustait, il expliquait les caractéristiques de chacun. Le chocolat au lait est peu utilisé ici: on parle plutôt de chocolats contenant un minimum de 65% de cacao.

Lorsqu’on dépose un morceau de chocolat dans la bouche, on doit d’abord voir s’il fond sur la langue. Un chocolat de haute qualité ne devrait pas être difficile à mâcher, car ça voudrait dire qu’il manque de beurre de cacao. Plus la fève de cacao est raffinée, plus le chocolat fondra dans ta bouche.

Généralement, les arômes du cacao sont divisés en trois catégories:

  1. «Herbal» (qui rappelle les plantes)
  2. Fruité
  3. Floral

Le cacao «herbal» est l’un des plus rares et des plus difficiles à obtenir. Très peu de fèves ont cette caractéristique. Mais David nous en a apporté un de Huayopata (un endroit près de Quillabamba) qui avait cet arôme et wow! Quel goût différent! Ça rappelle la terre mouillée avec une journée de pluie! Très différent (mais super bon), surtout à côté des arômes fruités et floraux. Le cacao chuncho, par exemple, a des arômes plus fruités. Le cacao porcelana a plus d’arômes de noix.

Pour déguster un chocolat, il faut faire comme suit. D’abord, on sent le morceau avec notre nez. Puis on le met dans la bouche et on mord un peu pour qu’il fonde sur la langue. On retient notre souffle pendant quelques secondes pour que les papilles gustatives capturent les saveurs sucrées, amères, citriques, salées… Mais comme les papilles ne permettent pas de capter les arômes, il faut ensuite inspirer par la bouche et expirer par le nez. Ça fera passer tout l’arôme du chocolat à travers les voies nasales et les particularités du morceau pourront être perçues. C’était quand même drôle, parce que je l’ai mal fait la première fois et je pensais qu’on pouvait pas respirer du tout, hahaha!

En termes d’additifs alimentaires, la lécithine est souvent ajoutée aux chocolats vu que c’est un émulsifiant (une substance qui aide à mélanger deux substances hétérogènes – comme l’eau et l’huile). La lécithine, par exemple, est utilisée pour empêcher la formation d’une petite couche blanche sur le chocolat. Ainsi, lorsqu’un chocolat a un peu de blanc, ça peut signifier trois choses:

  1. Il est passé date.
  2. Il n’a pas bien été tempéré.
  3. C’est un chocolat «puriste» sans additif alimentaire. Certains producteurs décident de ne pas mettre de lécithine vu qu’elle peut modifier la saveur, bien que la proportion nécessaire soit très minime.

Évidemment, je ne suis pas une experte, mais déguster des chocolats avec mes amis m’a permis d’aiguiser un peu mes papilles. Il est préférable d’essayer plusieurs chocolats côte à côte, car c’est là que tu vas vraiment sentir la différence de saveur.

Bien que la photo soit sombre, voici une partie de la sélection de chocolats fins de David!


Pour conclure


Si tu veux visiter Quillabamba un jour, c’est bon de savoir que la «noche de café» (nuit du café) est organisée toutes les fins de mois. Les dates changent un peu, faque demande aux locaux ou écoute leur pub à la radio. Ça vaut la peine de faire le tour, parce que les producteurs de café et de cacao viennent vendre leurs spécialités régionales. Plus frais impossible! Pour voir mon guide sur quoi faire, c’est ici.

J’espère que tu as aimé en apprendre plus sur la production et la dégustation du chocolat! Encore merci à mes amis David et Rover, qui ont pris la peine de nous transmettre leurs passions et leurs connaissances. Grâce à vous j’aime maintenant le chocolat noir!

«Goûter» est un art que je ne maîtrise pas encore, mais j’y arrive. 😉

Et pour finir, je te laisse avec cette chanson: «Sabor a Chocolate» de Elefante!



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